• On dirait qu'on entend

    Pleuvoir le temps

    Usant les vieilles pierres

    De la rivière;

    On dirait qu'on entend

    Pleuvoir les ans

    Qu'emportent doucement

    Les eaux du temps.

     

    Maurice Carême.


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  • Une rafale une seule

    D'horizon à horizon

    Et ainsi sur toute la terre

    Pour balayer la poussière

    Les myriades de feuilles mortes

    Pour dépouiller tous les arbres

    Pour dévaster les cultures

    Pour abattre les oiseaux

    Pour éparpiller les vagues

    Pour détruire les fumées

    Pour rompre l'équilibre

    Du soleil le plus chaud

     

    Paul Eluard


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  • Ciel gris, bas, bouché, minotaure.

    L'odeur des fanes de l'automne

    Fume dans les royaumes gris,

    Sur les villages assoupis.

     

    On entend des soupirs qui sont

    Les testaments de la musique;

    Un pêcheur mince et bagué d'or

    Rit à son image sans yeux.

     

    Sous le frais sourire des aulnes,

    On chuchote dans les roseaux.

     

    Le soleil barbu s'époumone

    Dans ses carrosses, ses miroirs.

    Il y faudrait un cor de chasse,

    Une fée au bas des lavoirs,

     

    Une douce pluie d'arentelles,

    Un cercueil de verre filé

    Et l'impossible odeur de l'ombre

    Qui s'ouvre comme une anémone.

     

    Maurice Fombeure.


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  • La lune est rouge au brumeux horizon;

    Dans un brouillard qui danse, la prairie

    S'endort fumeuse et la grenouille crie

    Par les joncs verts où circule un frisson;

     

    Les fleurs des eaux referment leurs corolles;

    Des peupliers profilent aux lointains,

    Droits et serrés, leurs spectres incertains;

    Vers les buissons errent les lucioles;

     

    Les chats-huants s'éveillent, et sans bruit

    Rament l'air noir avec leurs ailes lourdes,

    Et le zénith s'emplit de lueurs sourdes.

    Blanche, Vénus émerge, et c'est la nuit.

     

    Paul Verlaine.

     

     


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  • Les flèches de la pluie

    brûlent et la route fume

    Et dix mille petites

    blessures étincellent

     

    La grille de la pluie

    tisse le paysage

    enserre les jardins

    et griffe la fenêtre

     

    Le grillage de la pluie

    étend ses doigts lisses

    sur les frais visages

    ruisselants des enfants

     

    Gabriel Cousin.


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